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Critiques

Fête de la Musique du 23 au 25 juin 2023


Le chœur La Psallette bâtit sa petite cathédrale

Sous les hautes voûtes de Saint-Pierre, l’ensemble genevois a fait dialoguer Anton Bruckner et Arvo Pärt. Ou quand des musiciens amateurs cheminent avec ambition.

Des centaines d’amateurs, éclairés et aguerris ou tout simplement viables pour la scène, sortent de leurs tanières à proximité du solstice d’été. On en croise par centaine à la Fête de la musique et, en les écoutant, on peut être traversé par toutes sortes d’émotions. De l’étonnement, par exemple, face à des révélations qu’on n’attendait pas vraiment, ou de l’attendrissement voilé de gêne en écoutant telle performance quelque peu maladroite. On classera sans hésiter le chœur La Psallette parmi les valeurs sûres, dans le vaste peloton de dilettantes. La formation n’a à vrai dire rien d’une nouveauté dans le paysage genevois et romand: sa naissance remonte à cinq décennies et ses activités ponctuent avec régularité les saisons musicales sous nos latitudes.

Programme peu convenu

Mais il faut souligner combien la cinquantaine de voix amateurs qui le composent – toutes placées sous la direction de Steve Dunn – a fait très belle impression à la cathédrale Saint-Pierre, en offrant aux nombreux mélomanes présents un programme exigeant et pas tout à fait convenu. Le plat de résistance? Bien consistant, avec des pièces choisies d’Anton Bruckner, compositeur autrement plus célébré et joué dans son versant symphonique. Ses motets et ses hymnes ont dévoilé des traits sombres et des ambiances tout en retenue; il s’en est dégagé un souffle mystique éloigné de la grandiloquence qui caractérise bon nombre de ses écrits orchestraux.

La Psallette en a ciselé les contours avec souplesse, en déployant une riche palette expressive et en posant des dynamiques marquées, depuis le liminaire «Locus iste» jusqu’au profond «Ave Maria». L’implication de la formation a fait oublier les quelques minuscules imprécisions dans les attaques ou le délitement ici et là de l’homogénéité des voix. On les a d’autant plus ignorées, ces imperfections, que l’affiche offrait d’autres belles promesses, celles du contemporain Arvo Pärt.

Un siècle et des poussières séparent la naissance de l’Allemand de celle de l’Estonien, et pourtant une cohérence stylistique a surgi avec force du dialogue entre leurs univers. Et ce, par-delà cet étonnant «Solfeggio», ouvrage boutade dans lequel Pärt s’amuse à superposer des gammes et à les faire chanter à dix reprises. Les véritables affinités se sont laissées cueillir ailleurs, dans cet ample «De Pacem Domine» surtout. Et les éclairés de La Psallette en ont illustré toute l’étendue.

Tribune de Genève en ligne
Rocc
o Zacheo
Publié: 24.06.2023, 21h58
https://tdg.ch/geneve

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Tribune de Genève du 26.06.2023. Photo: Magali Girardin.

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